Laurence Baranski et Ivan Maltcheff sont les organisateurs des rencontres Conscience et Citoyenneté dont la troisième édition sur le thème "Vivre libre” aura lieu en présence à Paris et en ligne le 9 décembre 2023 (de 13h45 à 18h30 heure française / de 7h45 à 12h30 pour le Québec).
Qu'est-ce qu'un citoyen conscient ?
Laurence Baranski - Être citoyen dans une version minimaliste, c'est faire partie de la Cité et contribuer à son fonctionnement. Être un citoyen conscient, c'est agir en conscience. Conscience de qui nous sommes en tant qu'être humain, conscience de notre rôle plein et entier, conscience de notre impact sur les collectifs et la société. Jusque-là on pourrait dire que ça ne change pas grand-chose à la notion de citoyenneté, sauf qu'on vient de faire entrer dans notre définition, la notion de conscience et qu’on se pose dès lors la question de la conscience et de sa nature.
Que devient notre civilisation à partir du moment où nous élargissons notre conscience et où nous réhabilitons la notion d'être humain ?
Qu'est-ce que la conscience ? Qu'en savons-nous ? Qu'en percevons-nous ? En quoi élargir notre conscience va changer la vie en société ? En quoi cela va changer nos priorités en tant que civilisation ? Et que devient notre civilisation à partir du moment où nous élargissons notre conscience et où nous réhabilitons la notion d'être humain.
Ivan Maltcheff - Nous avons clairement un parti pris lié à notre expérience, à nos parcours, mais aussi au parcours de personnes que nous accompagnons sur ce chemin : c'est que le fait d'élargir notre conscience, d'abord, nous rend beaucoup plus sensibles. On intègre la notion d'écologie intérieure qui nous rend beaucoup plus sensibles, par l'intérieur, au vivant, à la nature, aux relations avec tous les règnes du vivant et aussi au monde qu'on appelle subtil, pour ne pas dire invisible. Donc cela fait partie déjà d'une nouvelle représentation du champ dans lequel on agit.
Le deuxième parti pris, c'est que le fait d'intégrer cette notion élargie de la conscience remet en question beaucoup de certitudes, notamment les certitudes sur lesquelles sont basés les paradigmes de nos sociétés actuelles, donc notre éducation, et en particulier les certitudes que nous avons sur la place de l'humain dans le concert de la vie. Et donc ça, c'est très fondamental parce qu'en changeant de place, on change de regard, en changeant de regard, on change de priorité, et en changeant de priorité, on change tout notre système civilisationnel. Donc c'est très fondamental.
Qui sont les intervenants des prochaines rencontres ?
Laurence Baranski - Dans les rencontres "Conscience et Citoyenneté” nous choisissons, tout comme dans l'initiative d'accompagnement qui s'intitule "Réussir le passage” que nous conduisons avec Ivan, des personnes qui intègrent déjà ce questionnement sur la conscience dans leurs pratiques, quelles que soient leurs pratiques. Elles intègrent ce questionnement et elles-mêmes ont une expérience de l'élargissement de conscience, quel que soit leur discipline, leur champ d’action. Pour l'édition Conscience et Citoyenneté de 2023, nous aurons des regards croisés comme les autres années, sur la question de « Vivre libre ».
Nous aurons Sylvain Fève avec nous, qui est un scientifique spécialisé en photonique, c'est-à-dire la science de la lumière, je trouve ça très joli comme science, il a une approche clairement post-matérialiste, proche de la pensée de Philippe Guillemant. Sylvain nous parlera du libre arbitre en lien avec la liberté.
Laurence de la Baume, conférencière et journaliste, avec tout un parcours spirituel, et qui a écrit différents ouvrages, illustrera "La contagion du cœur", titre de son dernier livre. J’ai ainsi appris que le cœur est en fait notre premier cerveau. Il est capable de gérer et de recevoir 5 000 fois plus d'informations que le mental.
Gislaine Duboc, qui s'est fait connaître notamment depuis trois ans à travers des vidéos courtes quotidiennes sur YouTube, qui a un franc-parler réjouissant, et qui est chamane contemporaine interviendra tout au long de la journée en résonance avec les propos des autres intervenants. En tant que chamane, Gislaine, elle, est dans l'instant présent.
Luc Bigé, qui était notre parrain l'an dernier et que nous ne pouvons pas quitter, peut-être lui non plus, symboliste et écrivain, nous parlera de son approche de la liberté selon ce qu’il nomme les 4 voies d’accès à la connaissance.
Quand on entre dans la compréhension de qui nous sommes ensemble avec ce double regard visible et invisible, et qu'on en fait l'expérience, forcément ça change notre manière de faire société ensemble.
Et enfin, Audrey Chapot animera la table ronde finale. Audrey est auteure, anthropologue, et tradipraticienne. Elle propose un accompagnement en intégrant tout ce qui est traditionnel. Et le traditionnel pour elle, c'est la mémoire et l'enseignement des peuples premiers, des civilisations premières, c'est aussi l’enseignement et la prise en compte du sacré.
J'aime citer cette phrase d'Audrey qui dit « Il n'y a pas d'un côté un monde visible et de l'autre un monde invisible, il y a un monde à la fois visible et invisible, et ce monde c'est le nôtre. » Et forcément quand on entre dans la compréhension de qui nous sommes ensemble avec ce double regard visible et invisible, et qu'on en fait l'expérience, forcément ça change notre manière de faire société ensemble.
François-Marie Dru, musicothérapeute et spécialiste du chant diaphonique, ouvrira ces rencontres, et Lorenza Garcia clôturera l’événement. Elle est en France, la représentante des Indiens Navarro, elle est aussi chanteuse, musicienne, réalisatrice, et elle apportera sa voix et le son des tambours Navarro.
Quel est le profil des participants aux conférences ?
Ivan Maltcheff - Les participants, pour faire simple, sont à l'image des intervenants. C'est à dire, ce sont des personnes, pour leur immense majorité, qui ont déjà ouvert d'une façon ou d'une autre, et pour certains depuis très longtemps, ces questions de la conscience et qui ne se cantonnent pas à l'exploration de la conscience pour la conscience, mais qui sont aussi également de la même façon engagées dans les transformations sociétales, que ce soient des éducateurs, artistes, personnes d'entreprise, ou des participants à des collectifs citoyens. Un public assez divers, mais qui se retrouve sur les thèmes de la conscience et de l'agir dans le monde, dans une société complètement en recherche d'elle-même.
Les rencontres précédentes avaient pour thème "La conscience" puis les "Les nouveaux mondes sont déjà là”, pourquoi avoir choisi "Vivre libre" cette année?
Laurence Baranski - D'abord parce que nous choisissons les thèmes de manière collégiale et à l'intuition. C'est le thème qui est sorti du chapeau. La liberté en ces temps troublés et en beaucoup d’endroits, oppressants, nous semblait un bon thème. Notre manière de l'approcher n'est pas de dire comment sortir d'une matrice 3D, voire virtuelle qui serait en train de nous emprisonner. Parce que pour nous ce serait alimenter une forme de dualité. Nous partons de ce que veut dire vivre libre pour nous et nous invitons à le laisser grandir, à faire rayonner cette liberté. Et c'est pour cela que nous aurons des regards différents, ces regards croisés précédemment cités. Comment nous pouvons vivre libres dans un environnement oppressant ? Où sont nos forces ? Comment puiser dans l'être les forces à la fois de la liberté et de la transformation vers la liberté ?
Vous intervenez tous les deux auprès d’entreprises et de salariés. Les thèmes développés dans ces rencontres trouvent-ils écho dans le monde du travail ?
Laurence Baranski - A cette question, spontanément, j'ai répondu oui et non, et Ivan a dit non et oui. Donc on est clairement, quelle que soit la manière dont on le prend, dans un entre-deux. J'étais le week-end dernier à un grand événement de transformacteurs, de transitionneurs, et il y a clairement une appétence, un phénomène d'ouverture de conscience qui se passe, une curiosité et ce phénomène est vraiment grandissant voire exponentiel. Et en même temps, on constate tous et toutes une crispation du système et on se demande comment à un moment donné les forces, et je ne vais pas caricaturer en disant les forces du mal, mais à minima les forces de l'argent vont lâcher prise puisque l’être ne se quantifie pas et encore moins financièrement.
Donc on est sur deux logiques contraires qu'on essaie de concilier. Je pense que les personnes qui sont dans l'être sont prêtes à concilier avec l'avoir. Je ne suis pas sûre et nous ne sommes pas sûrs que celles et ceux qui sont dans l'avoir sont prêts à négocier avec l'être. Donc on est vraiment aujourd’hui à ce moment d’articulation.
Le système se révèle et pour autant il ne bouge pas, mais il se révèle à lui-même dans sa non-volonté réelle de changement, par contre dans sa capacité de récupération qui est extrêmement forte.
Ivan Maltcheff - Il serait extrêmement facile pour les milliards de milliards qui flottent au-dessus de la planète et qui cherchent à s'investir dans des investissements dits rentables aujourd'hui de favoriser l'éducation nouvelle, la santé nouvelle, toutes les initiatives d'un vivre ensemble différemment. Le nombre de citoyens qui souhaitent s'investir dans ces projets est important. Ce que nous voyons, c'est une multitude dans le monde entier d'initiatives, sans aucun moyen, qui passent leur temps à lutter avec du bénévolat, des bouts de ficelles, pour essayer de créer un monde nouveau. Donc là, clairement, il n'y a pas de volonté.
Par contre, effectivement, il y a beaucoup de belles déclarations dans ce que certains ont baptisé le greenwashing sur tous les sujets. Cette tension-là est aujourd'hui beaucoup plus forte encore qu'hier. Le système se révèle et pour autant il ne bouge pas, mais il se révèle à lui-même dans sa non-volonté réelle de changement, mais aussi dans sa capacité de récupération qui est extrêmement forte, sans trop bouger les lignes. Et au fond on se dit, où est la porte de sortie, où est l'espoir?
Ce que nous avons à faire, c'est créer les conditions de l'improbable parce qu'improbable, il y aura.
Laurence et moi, on avons été fortement inspirés par Edgar Morin dans ses différentes approches systémiques. Et Edgar Morin parle souvent de la survenance de l'improbable dans les temps d'incertitude. On se dit que ce que nous faisons et ce que nous avons à faire, c'est créer les conditions de l'improbable parce qu'improbable, il y aura. Mais il est impossible par définition de le définir.
La deuxième chose, c'est de se souvenir que nous sommes dans un temps de bascule d'une intensité rare, mais que ce moment de bascule s'inscrit dans un temps long. Il faut mettre en perspective toutes nos actions, comme l'ont fait tous les pionniers des droits humains, les pionniers de l'écologie, sur un temps long, et ne pas espérer qu'en un an, deux ans, trois ans, tout d'un coup, toute notre société et nous-mêmes allons être repeints du sol au plafond d'une nouvelle couleur avec une conscience ouverte et éveillée.
Un vade-mecum pour l'enracinement de nos actions et pour le lâcher-prise par rapport aux résultats immédiats.
Propos recueillis le 11 octobre 2023.
Informations et réservations pour les 3e rencontres Conscience et Citoyenneté du 9 décembre 2023.
Enfin ! Extrêmement intéressant à offrir comme perspective au passeport de vie d' "être humain " souverain : la conscience au service de l'émancipation et du développement évolutif de la LIBERTE , dans son contexte global .